Alors
"Papé " raconte nous le marchand de peaux de lapins..
Assis
en rond autour de l’aïeul, les petits attendent, les yeux brillants…
Et
lui, d’une voix basse et monocorde commence à égrener le chapelet
de ses souvenirs, s’arrêtant parfois, comme suspendu au temps qui
passe... Et puis il se décide, s’éclaircit bruyamment la gorge…
"C’était
il y a bien longtemps.. Nous étions nombreux alors dans le village,
et le travail était dur... Tout se faisait à la main, les foins, les
semailles, les vendanges, le bois, la lessive des femmes…
Parle
nous du marchand de peaux de lapins…
"Le
dernier que j’ai connu, c’était dans les années cinquante,
soixante… J’étais jeune alors, et dans la pleine force de l’âge..
Un
beau matin, depuis le fond du village, on entendait une grosse voix
qui criait… " Peau ! Peau de lapins !
Peau... ! " .
C’était
le Louis, un petit homme à la barbe aussi longue que ses cheveux.. Il
portait un grand sac... Il s’arrêtait devant chaque porte...
-Alors
c’est t-y que vous avez pensé à moi..
-
Mais oui Louis, mais oui..
Et la
maîtresse de maison partait vers la grange et en ressortait presque
aussitôt, les bras chargés de peaux de lapins...
Mais
d’où elles venaient ces peaux ?
C’étaient
les peaux des lapins qu’elle avait tués. Car voyez vous, à cette
époque, on n’achetait pas les lapins au super marché, on les
élevait..
Et le
marchand de peaux de lapins, alors, pourquoi il passait ?
Les
gens faisaient sécher les peaux de lapins. Pour cela , ils les
retournaient, poils en dedans, bourrées de paille ou de foin et les
suspendaient à une poutre ...
Quand
elles étaient sèches, alors le marchand passait.. Et on les lui
vendait pour quelques sous... puis on lui offrait un verre de vin ou
on l’invitait à déjeuner, ou à dîner.
Et qu’est
ce qu’il en faisait ?
Il
les vendait à un marchand qui lui même les revendait à un tanneur.
Elles servaient ensuite à faire des manteaux, des vestes, des bonnets
en peau de lapin… Les plus recherchées étaient les blanches, les
plus jolies...
Papé
et le chasseur de vipères alors ?
Ce
sera pour une autre fois.., une autre fois... |