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Nous
sommes en 1429 après le sacre du roi à Reims. L'annonce du
débarquement à Calais du roi d'Angleterre Henri VI et de deux mille
homme de troupe va réveiller l'ardeur guerrière de Jeanne.
Bon nombre de places fortes en France sont encore aux mains de
Anglais, bien qu'en certaines cités, l'envahisseur soit purement et
simplement expulsé par la population même. La guerre s'ouvre à
nouveau, mais, cette fois-ci, ce n'est pas la guerre du roi.
Jeanne se rend dès le mois de mars à Lagny, près de Paris
(actuellement Lagny-sur-Marne) Là, elle va préparer pendant près de
deux mois sa campagne de l'été. A Lagny, elle retrouve bon nombre de
capitaines et mercenaires qui lui restent fidèles. Une telle
concentration de troupes attire des bandes anglaises qui seront
battues à plate couture en différents points autour de Paris.
Jeanne est souvent à l'église de Lagny, où elle aime prier
dans une chapelle restée de nos jours intacte, et qui se trouve au
chevet de l'édiffice. C'est pendant cette période que les voix se
manifesteront une nouvelle fois à Jeanne après un long
silence, pour lui apprendre qu'elle sera bientôt arrêtée.
De fait, la campagne qui s'engage sera désastreuse pour la
pucelle, effectivement capturée tout près de Compiègne. C'est dans
la chapelle de Lagny que le miracle va se jouer. Jeanne évoquera cet
épisode lors de son procès, laissons-lui la parole.
"On venait d'apporter à la chapelle de Lagny un petit enfant
de trois jours mort sans baptême.
Il était déjà tout noir comme ma cotte de maille. Las
prêtres refusaient d'inhumer en terre bénite le corps de ce petit
bébé, un païen. Alors, les parents le déposèrent aux pieds de la
vénérable statue de Notre Dame des Ardents. Des jeunes filles
prièrent attendant un miracle. La mère sanglote.
A peine sait-on ma venue qu'on me supplie de venir intercéder
Dieu et Notre Dame. J'y allai, je priai avec les autres, et
finalement, il y apparut vie et bâilla trois fois, et puis fut
baptisé"
L'enfant retomba immédiatement dans la torpeur de la mort,
et, devant ce qu'ils considérèrent comme un miracle, les prêtres de
Notre Dame des Ardnets décidèrent de faire inhumer le petit corps
dans l'église. Une dalle gravée encore visible montre l'emplacement
de cette sépulture. Le fait, il est vrai, est troublant.
Un phénomène déjà rencontré
Le phénomène n'est cependant pas unique, et l'on trouve, dans les
traditions populaires françaises, de nombreuses narrations de
résurrection soudaines et très courtes ainsi survenues lors de
veilles de jeunes enfants morts.
De telles cérémonies se déroulaient effectivement lorsqu'un
enfant était décédé sans avoir pu recevoir, de son vivant, le
baptême. La famille pouvait rester des journées entières en
prière, en attendant "le miracle" qui, souvent, se
produisait effectivement !
En fait, il n'y a pas là d'intervention divine, directe du
moins, et les progrès de la médecine, des sciences anatomiques en
particulier, nous renseignent sur le phénomène.
Réintégrons la situation dans son contexte. L'enfant est mort
depuis trois jours, nous dit Jeanne (la tradition veut que l'on
attende au moins trois jours pour que se déroule une éventuelle
"résurrection"). Le corps est "noir comme ma cotte de
maille" dit Jeanne. Ceci prouve la mort effective de l'enfant, et
laisse supposer, ce qui est logique, qu'un phénomène de
décomposition est entamé.
Or, l'enfant est posé à terre, vraisemblablement près des
cierges, puisque l'on guette les moindres mouvements du petit corps
d'une part, et que l'on prie depuis longtemps d'autre part. Les
participants à cette prière collective sont tous mêlés, entassés
dirons-nous, dans la petite chapelle de Notre Dame de Ardents.
Il est inévitable que se produise un phénomène connu de la
médecine moderne, donc totalement expliqué, mais qui reste cependant
très spectaculaire à observer.
Passé trois jours après la mort, que suit de très près ce
que l'on nomme "la rigidité cadavérique", les muscles se
détendent et les corps retrouvent une certaine flexibilité. Les
ligaments et les organes redeviennent souples. Sous l'action
conjuguée de la chaleur des participants de celle délivrée par les
cierges (l'enfant est arrivé à la chapelle porté à bras), des
petites poches de gaz se forment, qui s'échappent tout naturellement
par la bouche. Le corps, assoupli, donne alors l'impression réelle
qu'un bâillement, souvent accompagné de gestes imprécis du corps,
se déroule.
Un témoin visuel pourrait croire effectivement que ces
mouvements incontrôlés, en tout point semblables aux mouvements de
la vie dans leur déroulement, sont le fait d'un acte raisonné, d'un
retour à la vie.
C'est ce qui se produisit, sans aucun doute, à Lagny. Pour
autant que ce qui autrefois, pouvait être considéré comme un
"miracle" perdre beaucoup de son éclat au fur et à mesure
de l'élargissement des connaissances de l'homme, il n'en ressort pas
moins que tous les phénomènes étranges ne pourraient pas, de nos
jours, trouver d'explication dite "raisonnée"... Il en va
ainsi de la formidable aventure de Jeanne d'Arc
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