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Le
Prélude
C'était le 14
juillet 1789.
Charles Bossard,
cultivateur comme la plupart de ses parents, avait 20 ans.
Tranquillement il partait surveiller ses récoltes qui n'allaient pas
tarder à être moissonnées. On est bien loin de Paris et aucun signe
ne vient troubler la sérénité de Charles. Oh! Il n'est pas riche,
loin de là ! Mais il se suffit à lui même et à sa famille. La
terre est bonne et la Vendée, auto-satifaisante, exporte même des
céréales et des légumes dans le reste de la région. La Vendée ? Non le Bas Poitou.
Quelques mois après, on apprend que la Bastille a été prise par des
"révolutionnaires" En Poitou on a toujours été
légitimiste et si la vie n'y est pas toujours facile on vit en bonne
harmonie avec les petits Nobles locaux. Oh! Pas des Ducs ou des Comtes
! seulement des petits Nobliaux qui travaillent la terre comme nous.
La récolte est bonne
et l'hiver s'annonce tranquille.
En Février 1790 le
temps se gâte. Abolition des vœux religieux, inventaire dans les
couvents et monastères.
En Mai les biens de
l'Eglise sont vendus comme biens nationaux.
Ca commence à bien
faire, nous qui étions plutôt pour ce nouveau régime, mais
toucher à nos Curés et nos moines ça ne va plus.
En Septembre (le 12)
un premier accrochage a lieu entre paysans et la Maréchaussée à
Saint Etienne du Bois.
Le 27 Novembre, la
constitution civile du Clergé met le feu aux poudres. La plupart des
Curés et des paroissiens refusent ce serment contraire à leur
croyance et à Rome.
Mais on envoie de
nouveau Curés "jureurs". Ils sont reçus à coup de fourche !
Et là ça se gâte.
Le 2 Mai 1791,
première émeute à Saint Christophe du Ligneron.
Le 2 Juin, perquisition à Saint Laurent sur Sèvre chez les Mulotins. Ces
mulotins étaient très aimés par les paysans.
En Janvier 1792, on
commence à enlever les cloches dans les Mauges. Les prêtres
réfractaires se réunissent au chef lieu du nouveau département.
Le 30 Avril
l'Assemblée de La Poitevinière réclame le retour des "bons
prêtres". On arrête les signataires et les curés réfractaires.
Beaucoup entrent en clandestinité.
Le 19 août,
insurrection du bas Poitou.
Mais c'est en
Février 1793 que les choses se gâtent réellement. La levée des
300.000 Hommes pour aller aux frontières. Or là , ça ne va plus du
tout. Le Poitou a toujours eu un statut spécial qui impliquait que
les recrues devaient rester en Poitou. C'est la révolte générale
et le début de la première guerre de Vendée.
Première
guerre de Vendée
Les
paysans ne livrent plus leurs produits aux villes. "Rien pour
ceux qui persécutent nos prêtres et envoient nos enfants à la
guerre".
On décrète les réquisitions.
On fait appel aux Dragons pour mater cette rébellion.
La Vendée militaire se constitue : Vendée, Maine et Loire, une partie
de la Loire inférieure formeront cette entité. Un peu partout, dans
les villages les grenadiers et les miliciens sont tués. A Saint
Florent le Vieil, 600 paysans armés font face à 150 gardes nationaux.
C'est un massacre ! Partout l'avalanche grossit à vue d'œil.
Cathelineau regroupe les rebelles et forme un début d'armée. C'est
un colporteur du Pin des Mauges père de 5 enfants. Il sera
surnommé " le saint de Vendée".
Le 20 Avril 1793 la ville
de Cholet tombe aux mains des rebelles après une bataille sanglante,
30 Vendéens et 300 républicains, le bataillon des Deux Sèvres est
pratiquement anéanti.
Le 15 mars, en Maine et Loire l'insurrection est victorieuse sur la
rive gauche du fleuve Mauge. Tout le Marais est aux rebelles, les
habitants de Beauvoir ont désarmé les gardes Nationaux. Dans le
Marais Breton, celui de Charrette, la situation n'est pas meilleure. Le
Bocage également, Mortagne est prise sans coup férir. Les deux
routes qui se croisent au Quatre chemins de la Patte d'Oie sont
occupées. (ce carrefour stratégique sera pris, repris et disputé
avec acharnement pendant toute la guerre).
Le 23 Mars, devant l'ampleur de la rébellion, le Conseil Exécutif
décide l'envoi de 3 armées : Berruyer pour Fontenay avec quinze
mille hommes et quinze canons, La Bourdonnaye s'avancera de Rennes,
Beaufranchet d'Ayat quittera la rive droite de la Loire. Le but étant
d'envelopper les rebelles avec l'aide des troupes de Verteuil et de
Clancaux.
Devant ce déploiement de force Cathelineau sonne le tocsin et réunit
le 7 avril 16000 hommes sous les armes. Charrette fait de même à
Machecoul.
Sur tous les points les républicains vont trouver des armées
Vendéennes sorties de terre.
A Chemillé la victoire revient aux Vendéens grâce à d'Elbée. Mais
Bonchamps et Stofflet sont battus et se réfugient à Mortagne.
Mais c'était sans compter avec La Rochejacquelein !
Après s'être fait un peu prier, il prend la tête de 15 paroisses et
après avoir prononcé les paroles célèbres "si j'avance,
suivez moi ; si je recule, tuez moi ; si je meurs, vengez moi".
Il fonce sur Quétineau, le défait, puis va à Mortagne prêter main
forte à d'Elbée, Stofflet et Bonchamps avec un millier d'hommes. Le
20, ils attaquent les troupes républicaines à Bois Grolleau, puis en
cours de route 2000 hommes de Leigonier sont broyés, à Beaupréau le
22, ils écrasent le reste de l'armée, plus de 1000 prisonniers, 5
canons et des morts plein les rues. Poursuivie jusqu'à la Loire, il ne
reste que des débris de cette armée. Berruyer est suspendu ! (on le
retrouvera gouverneur des Invalides en 1804).
Le
5 mai c'est la prise de Thouars par La Rochejacquelein.
Quétineau se rend après de durs combats, il livre ses
officiers et soldats, l'artillerie, fusils et munitions, un
trésor de 500.000 livres et la presse aux assignats. C'est du
délire ! puis c'est Saumur, puis Parthenay. Mais c'est l'échec
cuisant pour les Vendéens à Fontenay qu'ils fuient en laissant
d'Elbé sur un brancard et surtout 600 hommes et 30 pièces de
canon. Les républicains se réjouissent et disent " Cette
affaire a sauvé le département". Joie prématurée, le
30 mai 40.000 paysans envahissent La Chataigneraie et filent sur
Fontenay. En trois quarts d'heure la bataille est gagnée,
l'armée de Chalbos a laissé 3000 prisonniers et 40 pièces
d'artillerie dont la fameuse Marie Jeanne (un symbole pour les
Vendéens), mais les Vendéens évacuent, sans raison, la ville
le 30 juin laissant les habitants perplexes. (ainsi que les
historiens).
Charrette, dans le Marais va de victoire en victoire mais se
désintéresse du reste de la Vendée. |

François de Charette
Général en Chef de la Vendée
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Puis le 9 juin
c'est le tour de Saumur, 11000 prisonniers (bientôt remis en liberté) 1500
hommes tués chez les républicains, un énorme butin 50 à 80 canons, 10000 à
15000 fusils et d'abondants approvisionnements. La navigation entre Tours et
Nantes est coupée, les troupes républicaines refusent de servir contre les
rebelles et demandent à partir aux frontières. La Flèche se rend à quatre
jeunes officiers Vendéens.
Les chefs de l'insurrection Stofflet, La Rochejacquelein, se concertent pour
envisager la suite. Paris ? Tours ? Angers ? Nantes ? mais les paysans en
décident autrement, ils rentrent chez eux... Cathelineau est nommé
Général en chef. Charrette avait repris Machecoul, son fief. Il est donc
décidé de prendre Nantes. Le 18 juin ils sont à Angers. Mais Nantes résiste
et ne tombe pas, 30000 à 35000 hommes assiègent la ville. Mais Cathelineau est
tué et les colonnes Vendéennes s'enfuient.
Westermann reprend les choses en main. Avec sa légion du Nord il reprend
Parthenay puis s'enfonce vers Clisson. Il flambe tout : maisons, granges,
récoltes ; il tue tout ce qu'il trouve : hommes, femmes, enfants. Il conseille de
faire du pays un désert. Il décide de frapper au cœur la rébellion : à
Châtillon là où siège le Grand Conseil. Sa victoire est totale mais les
Vendéens se sentent humiliés. " Chatillon est aux mains des bleus"
25000 hommes accourent à l'appel du tocsin, tous les généraux sont présents.
Le 5 juillet l'armée Vendéenne fond sur Westermann qui campe sur la colline de
Château Gaillard à quelques pas de la ville, toutes les routes sont coupées,
c'est un massacre. De l'armée de Westermann il reste à peine 500 soldats, 4000
morts ou blessés, autant de prisonniers, Westermann se sauve et regagne,
piteux, Parthenay.
Un nouveau général en chef est nommé pour remplacer Cathelineau, ce sera
d'Elbée.
Mais les villes qui ont été prises sont aussitôt abandonnées. Elles
se sont armées et sont bien décidées à ne plus se rendre.
Kléber, avec
l'Armée de Mayence, écrase les "armées des aristocrates". La
bataille de Cholet marque la fin des victoires et laisse les Vendéens
mortellement atteints. D'Elbée est grièvement blessé, Bonchamps agonise,
Lescure grièvement blessé. Partout en Vendée, c'est l'épouvante, pour fuir
les massacres, les survivants se ruent vers la Loire. 60 à 80000 hommes, femmes
et enfants, passent la Loire à St Florent dans une confusion indescriptible. Il
faut reprendre toutes les troupes en main. Nommer un nouveau Général en chef
pour remplacer d'Elbée, Lescure désigne La Rochejacquelein. Alors commence une
"virée" (la virée de Galerne) à travers l'ouest de la France :
Laval, Mayenne, Avranches, Granville, puis retour sur Mayenne, Sablé, Angers,
Le Mans. Là se pose la question : Faut-il monter sur Paris ? Mais tous ces
paysans n'ont qu'un souci, retourner chez eux. On revient donc vers la Loire en
passant de nouveau par Laval et c'est l'arrivée à Ancenis. Les batailles ont
été incessantes. Les armées républicaines subissent de nombreuses pertes en
hommes et artillerie. Le 16 Décembre 1793 c'est la tentative de passer la Loire
à Savenay. La foule est là, anxieuse et trempée. Le lendemain, l'avant garde
de Werstermann " le boucher de la Vendée" se lance à la poursuite
des Vendéens. C"est une boucherie épouvantable au dire de Carrier. La
Rochejacquelein, qui était passé de l'autre côté, pour y chercher des
embarcations, ne peut rejoindre ses troupes. Combien ? 10000 hommes et environ
30000 femmes et enfants vont être massacrés.

Ni les femmes, ni les
enfants ne furent épargnés |
L'armée
Vendéenne n'existe plus. Sur les 80000 à 100000 hommes qui passèrent la
Loire, 4000 seulement la repassent après Savenay. La victoire Républicaine
était totale. Werstermann pouvait déclarer " la Vendée est morte à Savenay sous les sabots de mes chevaux".
Mais il fallait compter avec Charrette !
Charrette avait un but, Noirmoutier, où les Anglais pouvaient débarquer avec
le renfort des émigrés.
Le gros des troupes républicaines, attaché à la poursuite des Vendéens en
marche pour Granville, laisse le champs libre.
Dans la nuit du 12 octobre, il prend Noirmoutier.
Haxo reçoit l'ordre de s'en emparer. Haxo était alors âgé de 60 ans.
Le 5 décembre il est à Beauvoir face à Noirmoutier. Charrette s'enfuit mais
les troupes d'Haxo sont rappelées vers la Loire pour empêcher la Grande Armée
de la traverser.
Charrette
regroupe ses troupes et se dirige dans le Bocage. Il s'empare du point stratégie
des Quatre Chemins de l'Oie, puis de Herbiers, anéantit le poste de Cerizay et
atteint Maulévrier. Il y est rejoint par La Rochejacquelein mais les
retrouvailles sont plutôt froides.
Pendant ce temps Haxo prépare la prise de Noirmoutier. Pressentant le danger,
Charrette regroupe 8000 hommes et les précipitent sur Machecoul qu'il prend
mais abandonne presque aussitôt.
Le 2 janvier 1794, Haxo attaque Noirmoutier. Dans l'île, 2000 hommes. D'Elbée,
malgré ses blessures est là et par ses conseils participe à la défense. Mais
l'île capitule à condition d'obtenir la vie sauve. Haxo donne sa parole. Mais
Turreau passe outre et fait exécuter les 1500 prisonniers. D'Elbée mourra le
dernier, sa femme sera exécutée quelques jours plus tard.
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